Tisser, travestir, traduire

Logo colloque 2023
Eelise N’Dri / Sandrine Appiah

Tisser, travestir, traduire

Verbatim, Numéro 4 (2024)

Dans ce numéro :

Ventriloquer Hersant la louve : réaffirmation d’un discours misogyne dans Renart le Contrefait, Madeline Tessier (Université McGill) (À VENIR)

Se transformer pour se retrouver : le rôle authentifiant du travestissement dans La Minotaure de Maël Maréchal, Juliette Rolland-Apergis, Autrice 2 (Université McGill)

Mère-solitude d'Émile Ollivier : travestir le genre de l'enquête pour traduire la complexité du réel, Ophélie Proulx-Giraldeau (Université McGill)

Le texte en drag : une nouvelle métaphore pour penser la traduction au-delà de la binarité, Lu Zhang (Université Sorbonne Nouvelle, laboratoire CLESTHIA) 

Tous droits réservés.

15e édition du Colloque estudiantin de l'ADELFIES

Affiche Colloque

 

Qu’on brode ou qu’on emmêle, qu’on masque ou qu’on (dé)voile, qu’on déguise ou qu’on maquille, la pratique littéraire peut s’apparenter à un (dés)habillement.
Extrait de l'appel à communications

La 15édition du colloque estudiantin de l'ADELFIES s'est tenue à l'Université McGill le 17 mars 2023.

Appel à communications : 

Qu’on brode ou qu’on emmêle, qu’on masque ou qu’on (dé)voile, qu’on déguise ou qu’on maquille, la pratique littéraire peut s’apparenter à un (dés)habillement. À l’occasion du 15e anniversaire de son colloque estudiantin annuel, l’Association des étudiant(e)s en langue et littérature françaises inscrit(e)s aux études supérieures de l'Université McGill (ADELFIES) souhaite rendre hommage à son département et à ses trois disciplines phares, la littérature, la création et la traduction. Pour ce faire, nous vous invitons à les interroger à travers le prisme de deux métaphores vestimentaires : le tissage et le travestissement. 

Le thème du tissage parcourt la littérature depuis l’Antiquité, avec Pénélope trompant ses prétendants (Homère, Odyssée, II) et Arachné défiant Minerve au métier à tisser (Ovide, Métamorphoses, VI), jusqu’à nos jours – pensons aux réécritures contemporaines de ces mêmes textes (The Penelopiad de Margaret Atwood), mais aussi aux contes de fées et à la littérature engagée (révolte des tisserands silésiens de 1844 dans le poème “Die schlesischen Weber” de Heinrich Heine et Die Weber de Gerhart Hauptmann). Le tissage, dans nombre de ces textes, n’est pas présenté comme une activité manuelle anodine, mais comme une véritable production artistique, et porte ainsi une mise en abyme et réflexion métapoétique. Le mot « texte » ne vient-il pas du substantif latin textum, étoffe, tissu ? Pour composer son texte, l’auteur·ice entremêle différentes voix, tisse ensemble motifs et références. Charge alors au lecteur de trouver la bonne distance d’observation – contemplation de la fresque ainsi produite dans son ensemble ou analyse à la loupe de sa composition (fils de trame et de chaîne, types d’entrecroisements) – mais aussi de poursuivre le tissage pour rattacher cette étoffe à la toile plus vaste de son contexte sociopolitique, littéraire… voire de s’en inspirer pour réaliser sa propre tapisserie. Les figures de tisserand·es littéraires sont multiples (personnages, auteur·ices, lecteur·ices) et appellent différentes perspectives d’analyse : lectures sociologiques (Jack Zipes montrant comment le conte Rumpelstilzchen des frères Grimm reflète la façon dont les hommes ont dépossédé les femmes de leurs compétences en matière de filage à l’aube de la révolution industrielle), métapoétiques (Assaël, Greber, Scheidegger Lämmle) ou comparatistes (Frontisi-Ducroux, Heidmann), théories du dialogisme et de l’intertextualité (Bakhtine, Genette, Kristeva), de la lecture (Riffaterre, Eco), recherche-création, etc.

Le travestissement, pour sa part, peut être défini comme une manière de se vêtir qui n’est pas conforme à un code vestimentaire donné. Est déguisement tout accoutrement qui délaisse la fonction socialement normée du costume pour devenir un « habillement » permettant l’exploration d’une subjectivité (Barthes). Parfois instrument de ruse (comme le déguisement en mendiant d’Ulysse ou celui de lépreux de Tristan), parfois signe d’une originalité poétique (comme les robes élégantes d’Emma Bovary), parfois attestation d’une beauté morale (comme l’habillement de vieillard juif de Solal au début de Belle du Seigneur), la pratique du déguisement est constamment renouvelée par les personnages, qui explorent les possibilités de (dé)voilement qu’elle représente. Se travestissent aussi les personnages shakespeariens qui s’habillent avec les vêtements associés au genre opposé, ce qui mène à de nombreux renversements de situation et quiproquos (Peltrault). Au travestissement « réel » s’ajoute le « travestissement textuel » qu’ont employé certaines autrices (comme George Sand et Colette), pour qui la construction d’un éthos ou d’un « masque pseudonymique » représentait un moyen d’accéder à un statut auctorial, mais aussi de « s’auto-engendrer en tant que sujet écrivant » (Arvisais). Le texte lui-même peut se travestir lorsqu’il joue avec les frontières ambiguës des genres littéraires ou prend la forme du détournement parodique d’une œuvre du canon littéraire : on peut ici penser aux versions dites « travesties » des épopées d’Homère et de Virgile qui circulaient au XVIIe siècle (Belle) ou à la réinvention du roman arthurien au Moyen Âge tardif à travers un recyclage parodique (Victorin). Source de transgressions vestimentaires, le travestissement est exploité par certains groupes marginalisés pour mettre en lumière l’interinfluence qui existe entre « vêtement, genre et pratique sociale » dans le but de déconstruire les codes vestimentaires genrés (Castaing et Lignon).

Pour finir, nous entendons « traduire » dans toutes ses acceptions, afin d’exploiter la richesse polysémique du mot. D’abord, « faire passer d'une langue dans une autre, en tendant à l'équivalence de sens et de valeur des deux énoncés » (Le Robert); nous ne nous limitons d’ailleurs pas à la traduction littéraire et souhaitons inclure la traduction intersémiotique (Jakobson) pour accueillir les travaux portant sur d’autres types de traduction. Ensuite, traduire en tant qu’« exprimer, de façon plus ou moins directe, en utilisant les moyens du langage ou d'un art » (Le Robert), pour permettre d’explorer le pan de la création littéraire. Dans tous les cas, il s’agira d’interroger le traduire en connexion avec tisser et travestir. Traduire et travestir, d’abord, renvoie au discours sur la traduction, où les métaphores liant travail traductif et déguisement ou vêtements sont nombreuses : “an author is said to clothe meaning in language; a translator then communicates the meaning of the foreign text by changing its linguistic clothes.” (Venuti) Le travestissement soulève des questionnements autour de la notion controversée de « fidélité » en traduction; à cet égard, la convocation des réflexions des théoriciennes féministes de la traduction s’avère pertinente (Chamberlain). On pourra aussi s’attaquer à la relation entre traducteur·ice et auteur·ice, ou interroger les frontières de la traduction en s’intéressant à la pseudo-traduction (Jenn). La dimension subversive du travestissement peut aussi s’appliquer à la traduction; il s’agira alors de mettre en évidence la manière dont elle peut être utilisée pour inquiéter ou renverser un ordre établi (Haroldo de Campos, Tymoczko, Diptiranjan, Ramakrishna et Nerhu). Traduire et tisser, ensuite, invite à interroger la traduction comme création, comme laboratoire d’expérimentations, à la considérer comme processus et pas seulement comme résultat : se déploie alors la branche de la critique génétique (Cordingley et Montini), avec l’étude des brouillons (Munday, Hersant), l’étude de la correspondance traducteur·ice/auteur·ice (Berri), l’intertextualité et la polyphonie en traduction (Folkart) ou la traduction collaborative. 

Ce colloque invite en somme à interroger littérature, création et traduction à l’aune du tissage et du travestissement, à sonder ainsi ce que ces disciplines ont de protéiforme, de composite et de subversif. 

Les étudiant·es d’études littéraires, de traduction, de création et d’autres disciplines dont les recherches s’inscrivent dans le thème du colloque sont invité·es à nous soumettre un descriptif de communication. Faites parvenir votre proposition d’un maximum de 250 mots ainsi qu’une brève notice biographique à l’adresse colloque.adelfies@gmail.com avant le 31 décembre 2022. Les communications, d’une durée de 20 minutes, seront suivies d’une période de questions.

L’événement se tiendra sur le campus de l’Université McGill en mode hybride et en conformité avec les normes sanitaires en vigueur en date de l’événement, soit le 17 mars 2023. Veuillez nous indiquer, au moment de l’envoi de votre proposition, si vous envisagez de vous rendre sur place ou de faire votre communication en distanciel. 

Veuillez noter que comme il s’agit d’un colloque étudiant, nous n'avons pas de fonds disponibles pour vous aider à financer vos déplacements ou votre hébergement. Nous vous invitons à vous informer auprès de votre établissement concernant les possibilités de financement.

Dans le but de rendre cet événement aussi accessible que possible, nous vous invitons à communiquer avec le comité organisateur si vous avez des questions concernant l’accessibilité au colloque ou si vous avez besoin d’accommodements.

Programme.

Le temps d'une pause

Affiche le temps d'une pause
Elen Kolev

Le temps d'une pause

Verbatim, Numéro 3 (2023)

Dans ce numéro :

  • « Avant-propos »Élisabeth Chevalier (Université McGill) et Sandrine Duval (Université McGill)

  • « Le sens de l'interruption : les modulations de l'enjambement chez Serge Gainsbourg »Alexandre Larouche (Université du Québec à Montréal)

  • « "; – " : histoire éditoriale et stylistique d’un alliage de ponctèmes dans Bouvard et Pécuchet de Gustave Flaubert »César Mailhot (Université Lumière Lyon 2)

  • « Le fragment ou l’interruption volontaire d’écriture. Le cas de Bleuets (2009), de Maggie Nelson », Salomé Landry Orvoine (Université McGill)

  • « Une retraite "d’écriture" : la pause comme condition de création dans Les deuxièmes de Zviane », Étienne Maillé (Université de Montréal, CRILCQ)

  • « Incursion littéraire dans le flux », Emmanuelle Lescouet (Université de Montréal)

Aménager la liste

Aménager la liste
Elen Kolev

Aménager la liste

Verbatim, Numéro 2 (2022)

Dans ce numéro :

  • Avant-propos, Étienne Poirier (Université McGill) et Mathilde Vallières (Université McGill)

  • Dossier "Aménager la liste" : 

    • Inventorier l'archive. La fonction mémorielle de la description de photographies chez Perec et Modiano, Émilie Drouin (Université de Montréal, CRILCQ)

    • Poétique de la liste et thérapeutique de la dé-coïncidence dans L'homme aux trois lettres de Pascal Quignard, Éric Bérubé (Université Laval)

  • Écrire, c'est perdre des morceaux. Écriture et différence sexuelle dans Folle de Nelly Arcan, Francesca Caiazzo (Université de Sherbrooke)

  • Regards transhistoriques sur la liste et le catalogue, Table ronde réunissant les professeur.e.s Isabelle Arseneau (Université McGill), Ollivier Dyens (Université McGill) et Madeleine Jeay (Université McMaster)

  • Section "Initiation à la recherche" :

    • Répétition et étrangeté dans Pourquoi Bologne? d'Alain Farah, Alicia Lafortune (Université McGill)

    • Imaginaire de la fin et conscience apocalyptique dans Le fil des kilomètres et Le poids de la neige de Christian Guay-Poliquin, Florence Lavoie (Université McGill)

    • La littérature médiévale, grande génératrice de mèmes : un travail de vulgarisation et de création, Ana Popa (Université McGill)

    • Inverser le passif et l'immatériel : la poésie des trobairitz à la rencontre de la lyrique masculine, Madeline Tessier (Université McGill)

Téléchargez ce numéro ici.

Tous droits réservés.